Mlle Peggy,Infirmière

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94, France
Mes patients m'appellent souvent Mlle Peggy ,c'est une façon pour eux d'établir une proximité sans pour autant être trop familiers,une sorte de formule "intermédiaire" entre le tutoiement et le vouvoiement,qui leur convient et que je trouve charmante.Vous l'aurez donc compris ,mon quotidien est de soigner les corps et les âmes,"les petites histoires de Mlle Peggy" sont des brèves de vies,qui vous feront rire,parfois pleurer,souvent réfléchir,enfin qui vous laisseront rarement indifférents,je pense. Ah j'ai oublié de vous dire mais vous avez du le deviner:je suis infirmière,et je pratique mon art à domicile,en petite banlieue parisienne.Je tiens à préciser que par souçi du respect du secret médical auquel je suis soumise,les lieux,les identités des patients et leurs familles,les pathologies sont modifiés,et les faits sont romancés. Toute ressemblance avec des personnes ayant réellement existé est purement fortuite. Bonne lecture!!!

lundi 13 février 2017

Les mots doux .


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Aujourd’hui il fait froid.
Il est 6h45 lorsque je ressens le vent glacial sur mon visage.
Je relève mon col, ajuste mon écharpe, j’inspire une bouffée d’air frais et je me lance dans les rues quasi désertes.
Je consulte les patients les uns après les autres et progressivement la ville se réveille.
Vers 10h00, je me rends chez un patient qui est sorti de l’hôpital hier soir après y être resté une dizaine de jours.
Nous nous connaissons depuis plusieurs années, il me fait confiance et s’adresse souvent à moi avant de consulter le medecin.
Mr P. est un homme de 80 ans aux convictions affirmées, il fait souvent preuve de maladresses verbales voire de mauvaise éducation.
Je le soigne pourtant dès qu’il est nécessaire de le faire et il refuse de faire appel à un autre cabinet.
Pourtant je ne partage pas ses opinions politiques.
Je n’aime pas ses manières.
Je ne supporte pas l’attitude machiste dont il fait preuve à l’égard de sa femme.
J’exècre la vulgarité de ses propos.
Je n’apprécie pas sa conversation.
Pourtant, je le soigne comme tous les autres, ni mieux, ni moins bien.
 Juste de façon professionnelle, tout simplement parce que chacun doit pouvoir bénéficier des meilleurs soins possibles.
On évoque souvent la difficulté d’établir la bonne distance soignant-soigné lorsque l’on devient trop empathique mais rarement lorsque l’on ressent de l’antipathie, et pourtant c’est tout aussi difficile.
Ce matin, il est en pleine forme !
« Ah Peggy, je suis content de vous voir ! Ça va bien chez vous ? Les enfants ? »
-Bonjour Monsieur, tout le monde va bien, je vous remercie. Votre séjour s’est il bien passé ?
« Mouais tout le monde était super ! Les filles étaient chouettes, par contre elles ont un boulot dingue les pauvres ! Elles savent plus où donner la tête, il y en a une qui s’est faite engueuler parce qu’elle a fait une connerie, elle pleurait dans ma chambre pendant le soin ! Et puis on attend des plombes pour un examen, personne ne sait rien de rien. Bref le gros bordel… »
-et sinon le medecin qui vous a opéré ? Vous êtes satisfait ?
« Ouais, je l’ai vu 5 minutes avant ,5 minutes après, il m’a pris 200 balles de dépassement d’honoraires. Franchement c’est un bon taf ! Et puis je ne vous parle pas de la bouffe, j’ai pris une chambre individuelle qui m’a couté 100 balles par jour et j’avais même pas une bouteille d’eau minérale ! »
-en même temps l’hôpital n’a jamais été réputé pour son hôtellerie ! dis-je sarcastique.
« Non c’est vrai ! Heureusement, il y avait une petite négresse qui était bien gentille ! C’était l’infirmière de nuit, je lui donnais 2 balles et elle allait me chercher des bouteilles d’eau au distributeur. »
En entendant ses mots, je tressaille. Je sens un battement dans ma tempe droite taper de plus en plus rapidement.
Je ne peux pas laisser passer ça.
Je suis soignante certes mais je ne peux pas tout tolérer tendre la joue gauche et me taire.
Je dirais même que je dois réagir.
-Pardon ?
« oui une petite noiraude, très gentille, d’ailleurs le service en était plein ! Elle s’est occupé de moi pendant une semaine, et elle même venue me dire au revoir quand je suis parti. Par contre, j’ai pas retenu son prénom ! »
-Vous pouvez me rappeler ce qu’elle faisait ?
« c’était l’infirmière ! »
-et que faisait elle ?
« Ben vous savez bien, elle me soignait ! »
-et vous a-t-elle manqué de respect ?
« Oh ben non alors ! »
-alors pourquoi le faites-vous ?
« Comment ça ? »
-pourquoi manquez-vous de respect à tous ces gens qui vous ont soigné et particulièrement à celle qui vous a le plus aidé ? la petite « négresse » ?
« Ah ça mais c’est un mot affectueux ! Et puis les autres ils font ce qu’ils peuvent ! »
-non Monsieur, ce n’est pas un mot affectueux, c’est un terme raciste utilisé par les esclavagistes ! Tous ces gens qui vont ont soigné font ce qu’ils peuvent avec les maigres moyens qu’ils ont. Et ils vous ont malgré tout remis sur pieds.
Surpris, il est reste silencieux, il semble réfléchir.
-je vous souhaite une bonne après-midi Monsieur, à demain.
« A demain Peggy, et merci d’être venue. »
La situation que les soignants vivent actuellement est insupportable.
Le système se fissure de toutes parts.
La qualité des soins se dégradent.
Les patients insatisfaits ne respectent plus les soignants.
Les élections approchent, les promesses affluent…..
Nous sommes 600.000


Signez et partagez le manifeste des 600.000

https://secure.avaaz.org/fr/petition/Aux_femmes_et_hommes_politiques_aux_soignants_et_patients_Conditions_de_travail_decentes_Hausse_des_salaires_et_des_hono/?pv=57

1 commentaire:

  1. C'est ce qu'on appelle le quotidien et la banalisation des propos... Ce qui est le plus choquant, c'est que la plupart du temps, ces mots sortent de la bouche de personnes qui n'ont absolument pas conscience de la portée de leurs propos... Et malheureusement, il n'y a plus beaucoup de personnes qui réagissent à ces propos. Bravo pour votre courage et il ne faut pas baisser les bras il faut se battre contre cette banalisation !

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