Mlle Peggy,Infirmière

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94, France
Mes patients m'appellent souvent Mlle Peggy ,c'est une façon pour eux d'établir une proximité sans pour autant être trop familiers,une sorte de formule "intermédiaire" entre le tutoiement et le vouvoiement,qui leur convient et que je trouve charmante.Vous l'aurez donc compris ,mon quotidien est de soigner les corps et les âmes,"les petites histoires de Mlle Peggy" sont des brèves de vies,qui vous feront rire,parfois pleurer,souvent réfléchir,enfin qui vous laisseront rarement indifférents,je pense. Ah j'ai oublié de vous dire mais vous avez du le deviner:je suis infirmière,et je pratique mon art à domicile,en petite banlieue parisienne.Je tiens à préciser que par souçi du respect du secret médical auquel je suis soumise,les lieux,les identités des patients et leurs familles,les pathologies sont modifiés,et les faits sont romancés. Toute ressemblance avec des personnes ayant réellement existé est purement fortuite. Bonne lecture!!!

dimanche 27 avril 2014

Les lascars et le daron

Voilà maintenant deux jours que je n'ai aucune nouvelles de Mr Cheet, j’ai même commencé à me faire à l'idée que je ne le reverrais plus mais là, je me suis emballée trop vite puisqu'il m'a appelle ce matin.
-"Allo Doc, c’est Cheet, on peut se voir ce soir vers 18h00 comme d'hab?"
-"pardon mais je vous entends mal....."
-"............"
Il a raccroché, je vais devoir y retourner.
18h00:l'endroit n'a pas changé, toujours autant de monde, l’affaire de Mr Cheet est un commerce qui tourne....
Je le retrouve dans l'appartement, toujours aussi sale, avec plusieurs comparses. Ils jouent au poker et sont déjà bien emechés.Le pansement que je lui ai fait la dernière fois est dans un  état déplorable, je ne sais pas ce qu'il a fait pour le mettre dans un état pareil, et je préfère ne pas le savoir.
Les bandes sont sales et déchirées par endroits et mouillées, je préfère pour le moment, ne pas imaginer l'état de la plaie.
Je commence les soins et je préfère ne pas lui demander ce qu'il a fait durant ces deux jours derniers, mais je décide quand même de lui toucher deux mots quant à la conduite à tenir avec une plaie aussi importante que la sienne et je lui explique clairement que j'arrêterai de le prendre en charge s'il ne fait pas preuve de plus de serieux.Le risque sceptique est important et je ne peux pas le soigner s'il ne respecte pas les conditions d'hygiène élémentaires. Prise dans mon envolée lyrique, je ne remarque pas que le silence s'est fait autour de nous et quand je relève la tête, je constate que tous les lascars présents dans la pièce me dévisagent comme si j'avais perdu la raison.....
Je me tais.
Je commence lentement à ranger mon matériel.
Mon patient baisse le regard et  caresse de sa main gauche les bandes neuves du pansement fraichement refait.
De longues secondes de silence passent, il relève la tête et me fixe du regard.
Je me lève.
-"c'est du bon taf, j’ai abusé vous avez raison, j’vous kiffe donc je vais faire attention. Demain même heure?"
-"ok demain même heure, bonne soirée."
Les gars s’écartent, je sors, désormais j'aurais moins peur.
Plusieurs semaines se sont écoulées, Mr Cheet a vu un médecin, et a suivi les traitements et les consignes médicales. Il e s'est efforcé également à respecter les rendez-vous. Malgré un stress constant pour moi j'ai réussi à établir un dialogue et à avoir des échanges avec mon patient qui ont même parfois donné lieu à quelques fous rires.
Il est vrai que j'ai une réputation de bavarde et je suis en générale assez volubile pendant les soins ce qui ne déplait pas aux malades, souvent seuls la plupart du temps.
Aujourd'hui je raconte à Mr Cheet et sa bande l'histoire d'un patient qui s'est suicidé après avoir accidentellement, blessé grièvement sont  fils.
A ma grande surprise, deux clans se forment instantanement:les partisans du père qui comprennent le geste lié à la culpabilité, il n'a pas blessé son fils volontairement ce sont les circonstances qui ont induit le drame et ils considèrent qu'il ne méritait pas de mourir. Les autres  pensent le contraire....
Chacun défend son point de vue en haussant de plus en plus le ton, un attroupement se crée sur le palier, tout le monde veut connaitre le fin mot de l'histoire quand soudain j'entends un gars qui hurle
-" MAIS POURQUOI TU LE DEFENDS ? C’EST UN POTE A TOI L'DARON? MOI J'TE DIS DARON OU PAS DARON, TU M'NIQUE ? J’TE NIQUE!!!"
Euh il va falloir que je désamorce le conflit car notre simple discussion est  en train de prendre une tournure inattendue.
-"Voilà, c’est terminé, vous n'avez plus besoin de soins"
-"quoi c'est terminé? Ça veut dire quoi????"
-"ça veut dire c'est fini, plus de pansement, on laisse à l'air libre, et vous restez tranquille!!!"
Silence.
Il observe sa main, l’approche, la recule pour mieux la voir et finit par me dire:
-"vous savez quoi docteur?"
-"non?"
-"Vous avez trop assuré!!!!"



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